La société MEDIAlibri, éditrice de GlobeKid, ayant malheureusement dû cesser ses activités, le site web de GlobeKid n'est plus mis à jour et ses fonctionnalités de création de livres, de personnalisation des livres créés par l'équipe GlobeKid, ainsi que de téléchargement des livres au format PDF et Ebook et de commande des livres imprimés reliés, sont désactivées.

Vous pouvez cependant encore accéder librement aux contenus des livres pendant quelque temps et nous contacter pour toute question par email contact@globekid.com.

Une rencontre extraordinaire

Une rencontre extraordinaire

Une rencontre extraordinaire

Pêche magique

« N’ayez pas peur, leur dit d’une voix douce le visage tout écaillé. Nous allons vous sortir de là ».
Deux bras immenses avaient déjà plongés au fond du trou et s’étaient emparés des enfants qu’ils avaient ramenés à la surface aussi facilement qu’une plume.
Le corps de Lisa était inerte. La petite fille s’était évanouie. Rob se débattait, lui, essayant de se libérer de la main rousse qui enserrait sa taille.
« Calme toi, petit, grogna le géant. Nous allons vous ramener chez vos parents ».
Les deux plus petites silhouettes entouraient Lisa.
« La petite fille saigne beaucoup trop. Il faut arrêter son hémorragie», dit la voix douce, en déchirant une bande de tissu de son espèce de manteau pour la nouer autour de la jambe de Lisa.
«Ta sœur est blessée. Nous devons la soigner avant de la transporter, expliqua le géant roux à Rob. Puis se tournant vers la plus petite silhouette :
«Olli, va vite chercher les remèdes ». Dans sa barbe, il ajouta : «ces maudits hommes, avec leurs pièges, non contents de détruire la nature, ils tuent aussi leurs propres enfants ».
Devant les yeux ébahis de Rob, la petite silhouette rejeta sa cape en arrière et dans un grand battement d’ailes, s’envola.
« Mais qui êtes-vous ? », demanda Rob.
Maintenant qu’il avait un peu moins peur, il osait lever les yeux vers le géant. Bien qu’il fût d’une abominable laideur, il n’était pas aussi effrayant que cela. Ses yeux pétillaient de bonté et on pouvait deviner qu’il souriait dans sa barbe.
« C’est une très longue histoire. Saches juste que nous ne sommes pas des monstres même si nous en avons l’apparence. Nous devons nous installer avec ta sœur dans un endroit plus confortable. Ne t’inquiète pas. Umma est une bonne guérisseuse, ajouta-t-il en désignant la silhouette sombre qui finissait d’emmailloter Lisa dans son manteau. Elle prit délicatement la petite fille dans ses bras et ils se mirent tous les trois en marche vers le lac.
Alors qu’ils atteignaient la rive, un battement d’ailes se fit entendre. C’était Olli qui revenait avec un sac énorme contenant une marmite, des plantes et des couvertures. Avec quelques branches, le géant eut vite fait d’allumer un grand feu sur lequel la marmite remplie d’eau et de plantes se mit bientôt à bouillonner. Umma remplit un gobelet qu’elle avait pris dans le sac avec cette mixture qu’elle fit boire à Lisa. La petite fille ouvrit les yeux.
« Ils vont te soigner et nous ramener à l’hôtel», la rassura Rob.
Umma avait recouvert la jambe de Lisa avec les herbes chaudes. Le géant s’activait autour du feu.
« Tu n’as pas faim ? , demanda-t-il à Rob.
« Un peu », répondit le garçon qui sentait son estomac gargouiller.
« Olli nous a ramené tout le nécessaire pour passer la nuit mais rien à manger. As-tu déjà pêché le saumon ? ».
« Jamais le saumon, ni autre chose », répondit Rob.
Le géant sortit de sa poche un canif, choisit soigneusement une longue branche qu’il se mit à tailler avant de lui attacher une ficelle au bout de laquelle il accrocha un bout de métal.
« Regarde, tu dois te mettre à un bon emplacement où le saumon ne peut pas deviner ta présence car il est très malin. Et tu dois lui faire croire que ton hameçon est une grosse mouche capricieuse car il est très gourmand et joueur ».
Assis sur un tronc d’arbre, le géant et Rob lançaient leurs hameçons au dessus de l’eau que la pleine lune faisait miroiter comme de l’argent. Le lac où le ciel rempli d’étoiles se reflétait était d’une beauté féerique. Rob n’avait jamais ressenti une telle paix. II se retourna pour voir Lisa. Assise au coin du feu, Umma la berçait en chantonnant. Olli, serré contre elle, dormait, ses ailes repliées.
La canne du jeune garçon se tendit soudainement.
« J’ai quelque chose ».
« Ramène le tout doucement vers toi », conseilla le géant qui avait enlevé ses bottes et ses chaussettes et entrait sans bruit dans l’eau. Il plongea d’un coup son bras dans l’eau et sortit un magnifique saumon argenté qui se débattait comme un beau diable.
« Prince du lac, mon jeune ami Rob et moi, Grom, avons faim. Pardonne nous de t’ôter la vie », déclara-t-il d’un ton solennel. S’avançant vers Rob, rouge d’émotion, il lui tendit le saumon.
« Voilà une première prise vraiment magnifique ! Allons la faire cuire».
Le géant avait mis le saumon à cuire sur le feu qu’il tournait au bout d’un bâton. Il découpa un grand filet qu’il donna à Rob sur une feuille en guise d’assiette. Le garçon se jeta sur le poisson qu’il dévora avec les doigts. Sa chair était rose et parfumée. C’était encore meilleur que les fraises des bois.
« Je sais, dit le garçon en relevant soudain la tête, vous êtes des Trolls. J’ai lu un livre sur les Trolls de Scandinavie».
«Pas tout à fait, même si certains d’entre nous, comme moi, ont des ancêtres qui en étaient. Si tu me promets de garder le secret, je veux bien de raconter notre histoire, mais je te préviens, elle est très triste. Il y a bien longtemps en effet de nombreux Trolls habitaient en Scandinavie. Contrairement à ce qu’on peut raconter, ce n’étaient pas du tout des êtres répugnants et maléfiques. Ils vivaient en bonne intelligence avec les autres créatures de la forêt. On ne sait pas exactement comment est arrivé le premier enfant humain. C’était une petite fille qui avait été brûlée par ses parents. Après, ça a été un garçon aveugle chassé de son village, puis de plus en plus d’enfants martyrisés ou abandonnés sont venus de partout se réfugier chez les Trolls. Les Trolls s’occupaient bien d’eux et les soignaient mais certains étaient si gravement blessés qu’ils durent recourir à de la magie très puissante en faisant appel aux pouvoirs des animaux pour les sauver. Elle eût des effets sur les enfants humains qu’ils n’avaient pas prévus. Le sortilège du poisson pour régénérer la peau brûlée leur fit pousser des écailles sur leur peau, celui de l’ours pour redonner des forces des poils, celui de l’aigle pour rendre la vue des ailes. Les hommes finirent par s’apercevoir qu’il se passait des choses étranges dans la forêt. Une nuit lors du solstice d’été, alors que tous les enfants trolls et humains étaient partis fêter l’événement dans la forêt comme c’est la coutume, ils trouvèrent les villages des Trolls et massacrèrent tout le monde. Quand les enfants découvrirent ce qui s’était passé, ils maudirent les hommes et décidèrent de partir au Nord, le plus loin possible, pour ne plus avoir jamais de contact avec eux. Après un très long voyage au cours duquel beaucoup périrent, ils s’installèrent dans cette forêt qu’ils protégèrent par un sortilège pour empêcher l’intrusion des hommes. Les années, puis les siècles ont passé. Avec le temps, les hommes oublièrent jusqu’au souvenir de cette tragédie. Le sortilège s’atténua. Tels que tu nous vois, nous sommes leurs descendants ».
Rob avait les larmes aux yeux. Grom faisait des étincelles dans le feu avec son bâton, l’air songeur.
« Endors toi maintenant, lui dit-il en lui posant une couverture sur les épaules. Dans quelques heures, toi et ta sœur, vous aurez retrouvé vos parents ».
Ce fut un chatouillis qui réveilla Rob. Lisa lui agitait une fraise des bois sous le nez en riant.
« Et ta jambe ? », lui demanda-t-il en sautant sur ses deux pieds.
« Plus rien du tout, répondit-elle en montrant fièrement sa cheville parfaitement guérie. Viens vite faire ton petit déjeuner. Papa et maman vont être trop heureux de nous retrouver ! ».
Umma, Olli et Grom s’activaient autour du feu. Une bouillie blanche au fond de la marmite exhalait une étrange odeur.
« Bonjour, les enfants. Goûtez, ce sont des racines. Elles sont très bonnes, mélangées avec des fraises et des myrtilles », leur dit Umma. Affamés, les deux enfants se jetèrent sur la mixture qui avait effectivement un bon goût de pain chaud, avec une couche de confiture en plus.
« Vite, vite, n’arrêtait pas de répéter Lisa qui trépignait d’impatience. « On y va. Il faut juste tout remettre en ordre. Tu ne voudrais quand même pas qu’on laisse la nature comme ça, s’indigna Grom. Mais attention, les enfants, vous ne devez parler de nous à personne. Vous direz que vous vous êtes perdus et que vous avez dormi dans la forêt. Compris ? ».
Marchant en file indienne, la petite troupe se mit en route. La torpeur qui baignait l’hôtel avait cédé la place à une grande effervescence. Des hommes s’agitaient dans tous les sens, certains sondant le lac, d’autres tenant en laisse de gros chiens qui reniflaient les rives. On entendait des téléphones sonner partout.
« C’est nous qu’ils recherchent ? », chuchota Lisa.
« Oui, probablement, répondit Umma. Mais glisse toi sous mon manteau. Nous devons nous rendre aussi invisibles que possible car si les hommes nous voyaient, ils nous tueraient ».
A pas de loup, ils contournèrent l’hôtel pour accéder à la suite des parents de Rob et Lisa au rez de chaussée qui donnait sur la forêt.
Par la fenêtre grande ouverte, on pouvait entendre la voix de leurs parents.
« Crois-tu que la police va les retrouver rapidement ? , disait leur mère.
« Je n’en sais rien. Mais je ne serai pas fâché qu’ils ne ré-apparaissent pas trop vite. Franchement, quelle tranquillité ! Je te le dis. On est bien mieux sans eux », déclarait leur père.
« Tu as raison », acquiesça leur mère.
Lisa et Rob s’étaient figés, le visage tout pâle comme si tout leur sang s’était retiré de leur corps.
« Vous voulez bien nous prendre avec vous ? », dit Rob d’une voix enrouée.
Umma ouvrit les bras. Lisa, les yeux débordant de larmes, s’y réfugia. En silence, tous les cinq s’enfoncèrent dans la forêt, sans se retourner.